20/04/2014
L’exposition des maudits au musée d’Orsay- Van Gogh/Artaud - Le suicidé de la société
Il fallait oser, exposer Van Gogh et « Le suicidé de la société » présenté en 1947 par Artaud dans le cadre d'une rétrospective des oeuvres du peintre. Sur les conseils de son ami Pierre Loeb, galeriste, Artaud se lança dans un des plus beaux réquisitoires contre la maltraitance, l'acharnement, l'incompréhension, à l’égard des génies que l’on enferme. Un texte d'une fulgurance saisissante, une imprécation contre la société et les psychiatres qui achèvent les artistes dans leur aveuglement le plus profond. Un texte inclassable, d'une beauté singulière, mais avant tout solidaire d'un autre"aliéné authentique".
Dans la lancée, on ne peut oublier la triste fin de Camille Claudel confiée à une institution psychiatrique qui la laissera mourir, livrée à l'abandon des siens et du même coup condamnée: affamée, nageant dans ses excréments, vêtue de hardes, emmurée vivante dès 1913. Le sort d’un Van Gogh ou d’un Artaud qui demeurera 9 ans en institut psychiatrique ne sera pas plus enviable. Antonin Artaud ne s’en remettra jamais et succombera à l’âge de 51 ans d’une overdose de sédatifs alors que Vincent Van Gogh, lui, mettra fin à ses jours en se tirant une balle en pleine poitrine, dans un champ de blé.
Ce blé qu’il aura recouvert d’or sous un soleil torturé , une tension si bien décrite par Artaud qui semble aussi la vivre de l’intérieur. Un pinceau mystérieux qui sait apporter des couleurs nouvelles et rayonnantes au cœur même du drame qui se joue au plus profond de l’âme d’un Van Gogh tourmenté . L’artiste, à travers ses éclats lumineux, semblait revenir d’un voyage intérieur au bout duquel il aurait été frappé par une lueur étrange qu’il nous offre ; souvenir d’une plongée abyssale d’où il extrait de ces noirceurs profondes des brassées de lumière. Une tension perçue par Artaud lui-même composé d’ombre et de lumière et dont le but suprême et identique consiste à éclairer les obscurités.
Artaud, à travers ce qu’il écrit de Van Gogh parle de lui et se penche sur un miroir qui lui renvoie sa propre image, non pas trouble ou distordue, car le génie fou d’ Artaud reconnaît son frère de génie et , là , où beaucoup n'ont vu que de la tension et de la folie, lui, au contraire n’a décelé que clarté et clairvoyance. Il savait que la lucidité supérieure de Van Gogh gênait les consciences ordinaires qui ne pouvaient accepter les « insupportables vérités » .
La perception infinie ouvre les portes de l’infini et en revenir amène à se sentir étranger parmi les hommes après avoir croisé la lumière des anges. Vincent Van Gogh et Antonin Artaud se sont brûlés aux flammes de la lucidité trop lucide pour être supportable.
Une exposition présentée par le Musée d’Orsay et guidée par Séverine Saint-Maurice , conférencière et guide agréée, le vendredi 25 avril, à 14h30.
Pour la visite guidée inscription par email à : parisexpositions@gmail.com
Au musée d’Orsay Van Gogh/Artaud. Le suicidé de la société
http://www.musee-orsay.fr/index.php?id=649&tx_ttnews[tt_news]=37162&no_cache=1
09:56 | Tags : muséed'orsay, van gogh, artaud, suicidé de la société | Lien permanent | Commentaires (0) | |
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05/04/2014
Rwanda - De commémoration en silence et de silence en commémoration
A la veille de la commémoration du 20 ème funeste anniversaire du massacre des Tutsi, Paul Kagame , président du Rwanda, rappelle « les complicités et les acteurs du génocide », entre autres, la France et la Belgique qui s’obstinent en un silence éloquent à nier leur implication dans la préparation et la participation au génocide.
Sur ces déclarations, François Hollande est revenu sur sa décision d' envoyer, à Kigali, la Ministre, Christiane Taubira supposée participer à la commémoration. A nous de conclure, face à un tel cas de deni, que la France, à l'époque sous la houlette de Mitterand, - qui s'activait avec la même fureur, en Bosnie, où y on compte aussi un génocide et le même refus de reconnaître le rôle qu'elle y a joué, - reste chez elle, c'est ce qu'elle a de mieux à faire; cogiter sur sa responsabilité entière, dans le massacre des Tutsi. On n'échappe pas à l'Histoire, elle finit toujours par vous rattraper !
A ce jour, le Vatican, non plus, n’a jamais voulu reconnaître et désavouer le rôle de l’Eglise catholique dans les massacres, -ou mettre en lumière le rôle trouble et grave d’un Perraudin, archevêque suisse, - et demander pardon à un peuple mutilé, trompé, bafoué dans ses croyances les plus profondes. On s’aveugle dans la préparation d’ une commémoration dont la forme première est une course à l’oubli et à l’ensevelissement des responsabilités.
Et que dire de la Suisse ? Quel a été le rôle précis de la Confédération qui enverra ses cinq conseillers personnels au Président Habyarimana dont les derniers Frei et Charles Jeanneret rappelé en 1993 et payés par la DDC ? Ni l’Eglise catholique ni le Vatican, ni la Suisse ne pouvaient ignorer l’escalade de violence et d’extermination systématique des Tutsi par les Hutu. La Suisse a bel et bien soutenu et encouragé la « démocratie ethnique « du régime Habyarimana.
Une commémoration perclue par la non-reconnaissance du fait historique. La volonté résidant surtout dans celle de continuer à ensevelir et taire, et poursuivre avec acharnement à faire croire que le massacre des Tutsi est une tragédie historique dans laquelle les responsabilités sont devenues inextricables et qu’il faudrait à tout prix et au plus tôt, recouvrir des cendres de l’oubli.
C'est dans l’agitation de la 20 ème commémoration, dans l’effervescence médiatique de l’événement en devenir, qu'on s’acharne à recouvrir de bruit le silence des menteurs. Or, la reconnaissance d’un fait permet non seulement de l’assumer mais surtout, il a pour effet, d’assurer qu’il ne se reproduira plus et dont découlera la force « du jamais plus ça » qui finira par devenir une réalité dans le paysage du monde enclin, enfin, à quitter, à jamais, les ténèbres de la cruauté la plus noire et si sombre pour laquelle les mots manquent à la décrire.
A l’heure, où je vous écris combien de génocides se préparent et se perpétuent dans le monde ? Combien de siècles nous faudra-t-il encore voir et subir la barbarie ?
Seuls les fantômes et leurs proches continuent à crier leur besoin de vérité, avec cette nécessité vitale et absolue, d’identifier les responsables et les coupables, d’entendre leur pardon, pour pouvoir tourner la page. Sans cela le passé continue à faire porter au futur, les stigmates de l’éternelle et constante barbarie, tapie derrière la porte et prête à revenir à n’importe quel moment.
Paix à l’âme de tous les disparus, paix à l’âme de tous ces innocents qui attendent encore que justice leur soit rendue et en solidarité avec tous mes amis rwandais qui ont perdu leurs proches, victimes de la folie du monde.
Une marche en mémoire des victimes est organisée par l’Ambassade du Rwanda, le 7 avril 2014 (de 16h00 à 16h40) et qui démarrera au croisement de l'avenue de la Paix et la rue de Lausanne suivie par la cérémonie de commémoration dans la salle principale de la Maison de la Paix (de 17h00 à 18h15).
Mes autres articles à ce sujet :
L'archevêque Perraudin ou la banalité du Mal
http://regardscroises.blog.tdg.ch/archive/2013/09/01/rwan...
De la bestialité des hommes et de l'humanité des bêtes
16:30 | Tags : rwanda, paul kagame, génocide, vatican, perraudin | Lien permanent | Commentaires (0) | |
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